Le B.A.BA du fer
Un article de la commission scientifique de l’AVF
Selon une croyance populaire répandue, l’alimentation végétarienne est susceptible de créer une carence en fer. Qu’en est-il ? Quelles sont les spécificités de l’alimentation végétarienne du point de vue du fer ?
Le fer dans les aliments
Dans les aliments, le fer est présent sous deux formes : héminique et non héminique. Le fer héminique, qui est absorbé à 25 % environ, se trouve dans le sang et dans les produits animaux.
Le fer non héminique constitue la quasi-totalité du fer apporté par les végétaux et une proportion variable mais majoritaire du fer apporté par les produits animaux. Son absorption est régulée par le stock déjà présent dans l’organisme. Elle est stimulée en cas de diminution du stock, et diminuée en cas de surcharge. Elle dépend du type de repas et peut varier sensiblement ; en moyenne, dans un repas omnivore classique, 5% de ce qui est ingéré est absorbé. Toutefois, des études ont montré que pour un même repas végétal, le fer contenu par ce repas est mieux absorbé par les végétariens que par les omnivores, ce qui signifie qu’avec le temps, l’organisme humain est capable de s’adapter à la forme qu’on lui fournit.
Du point de vue de l’apport en fer, contrairement à l’image courante, un régime végétalien, riche en aliments ayant un taux important de fer (légumineuses, oléagineuses, céréales) est préférable à un régime végétarien, dans lequel ces aliments sont remplacés par des sous-produits animaux (œufs, produits laitiers) n’ayant pratiquement aucun apport en fer.
L’absorption du fer non héminique est principalement activée par certains acides organiques contenus dans les fruits et légumes (vitamine C, acide citrique, acide malique) ; par la lacto-fermentation ; par la cuisson. Elle est en revanche principalement inhibée par l’excès de calcium (typique des repas français moyens riches en produits laitiers), les tanins, les protéines du jaune et du blanc d’œuf. Les phytates (pain complet, autres céréales complètes, légumineuses), que l’on considérait comme des inhibiteurs, ont en réalité peu d’effet.
Les dangers du fer héminique
L’organisme humain ne peut pas régler l’excrétion du fer, mais seulement l’absorption du fer non héminique : celle du fer héminique est stable. Le fer héminique participe à des réactions d’oxydo-réduction qui produisent des radicaux libres susceptibles de se lier au groupe nytrosile présent dans la viande rouge et la viande transformée, produisant dans les deux cas de puissants carcinogènes. De nombreuses études ont établi un lien direct entre la consommation de fer héminique et le cancer colorectal, de l’estomac et de l’œsophage. Le Fond Mondial pour la Recherche sur le Cancer (WCRF) et l’Institut Américain pour la recherche sur le Cancer (AICR), dans leur dernier rapport (mai 2011), ont mis en évidence la relation étroite entre le fer héminique et le développement du cancer de l’intestin et a recommandé une alimentation végétalienne riche en fibres. Par ailleurs, un taux de ferritine (protéine de stockage du fer) trop élevé dans le sang et un apport trop important de fer par l’alimentation sont corrélés au risque d’attaque cardiaque.
Les besoins en fer
La carence nutritionnelle la plus répandue dans le monde est la carence en fer, mais cela ne concerne pas plus les végétariens ou les végétaliens que la population omnivore. À condition de consommer des aliments complets, l’apport en fer par les végétaux – notamment céréales et légumineuses – est largement suffisant pour couvrir les besoins et ne comporte pas les risques liés à la consommation de fer héminique. Par ailleurs, les bactéries pathogènes ont besoin de fer pour survivre. En cas d’infection bactérienne, le système immunitaire lie le fer à la transferrine, le rendant indisponible pour les bactéries. Un faible taux de fer sérique peut ainsi être signe de la réaction de l’organisme à une infection plutôt que d’une carence.
Le rapport FAO/OMS sur les besoins en vitamines et minéraux estime les besoins en fer de 95 % de la population, en mg, entre 0,58 (enfants de 1 à 3 ans) et 3,27 (femmes en âge fertile). En France, pour un « repas français moyen », le taux d’absorption est d’environ 10 %, ce qui veut dire qu’il faut consommer entre 6 et 30 mg de fer par jour.
En adoptant une alimentation végétale diversifiée, on peut répondre parfaitement à ces besoins. Le tableau ci-dessous indique les aliments végétaux les plus riches en fer.
Quelques sources de fer végétal (mg Fe / 100g aliment).
algue kombu | 45,6 | levure de bière séchée | 18 | café torréfié | 17 |
thé noir | 17 | cacao en poudre | 13 | algue dulse | 12,8 |
sésame | 10 | pavot | 9,5 | amarante | 9 |
germe de blé | 8,6 | graines de lin | 8,2 | lentille | 8 |
pistache | 7,3 | millet | 6,9 | haricot de Lima | 6,8 |
soja | 6,6 | haricot blanc | 6,5 | graines de tournesol | 6,3 |
pois chiche | 6,1 | arroche des jardins | 6,1 | sucre brun | 6 |
triticale | 5,9 | avoine | 5,8 | algue nori | 5,2 |
épeautre | 4,4 | abricot séché | 4,4 | amande | 4,1 |
ortie | 4,1 | algue wakamé | 3,9 | sarrasin | 3,8 |
noisette | 3,8 | topinambour | 3,7 | pourpier | 3,6 |
feuilles de persil | 3,6 | truffe | 3,5 | épinards | 3,4 |
noix du brésil | 3,4 | salsifis noir | 3,3 | oignon | 3,3 |
figue séchée | 3,3 | blé | 3,2 | riz complet | 3,2 |
cresson de fontaine | 3,1 | cresson alénois | 2,9 | ail des ours | 2,9 |
seigle | 2,8 | orge | 2,8 | noix de cajou | 2,8 |
fenouil | 2,7 | noix | 2,5 | pruneau | 2,3 |
noix de coco | 2,3 | raisin séché | 2,3 | mâche | 2 |
salsifis sauvage | 2 | datte | 1,9 | chou vert | 1,9 |
olive verte | 1,8 | cacahuète | 1,8 | petit pois | 1,6 |